Il était une fois un petit grain de rien du tout. Il n’avait pas de couleur, pas d’odeur. Pas de goût, pas de texture, pas de forme. Il n’avait rien. Il n’était rien.
Marre de passer inaperçu, il décida de changer d’aspect.
Car voyez-vous, il ne ressemblait à pas grand-chose mais il avait un grand pouvoir : celui de se transformer en n’importe quoi… pourvu qu’il reste un grain.
Il accosta un grain de sel, mais il n’aimait pas son goût.
Il héla un grain de riz, mais il ne voulait pas qu’on le cuit.
Il attrapa un grain de maïs, mais il détestait le jaune.
Il vola un grain de sable, mais il n’appréciait pas qu’on lui marche dessus.
Il croisa un grain sur une photo, mais il avait du mal de rester immobile.
Il remarqua un grain de beauté mais il refusa qu’on le touche ou pire, qu’on l’arrache.
Il se cogna sur un grain de blé mais il n’aimait pas sa forme.
Désespéré de ne pas trouver un petit nom à son grain, il hurla aussi fort qu’il pu.
Un humain, passant par-là, entendit comme un chuchotement au creux de son oreille. Soudain, le bipède fut prit d’un comportement hallucinant : il sauta, couru, fit la roue dans la rue et cela au moins cinquante-six fois en moins d’une heure.
Une journaliste qui filmait la scène n’arrêtait pas de dire que l’homme devait sans doute avoir un petit grain de folie.
A ces mots, notre petit grain sauta de joie.
– Folie ! Oh que ce mot est doux, joli, plein de poésie ! Oui, je veux être celui-là !
Depuis, il ne cessa de suivre de près tous les hommes et toutes les femmes un peu bizarres. Il avait enfin trouvé une raison de vivre !
