Rapace du matin, je me sens bien !

7h15 ce mardi 9 juillet 2024. Je quitte la maison pour me rendre à mon travail.

Depuis la fin juin, j’observe quotidiennement l’évolution d’une nichée de Tourterelles turque. L’observation et le suivi sont faciles, car ce couple a choisi d’élever ses petits dans l’arbre qui est juste devant la maison, côté rue, sous mes yeux quand je suis à ma table du salon.

Photo : Marcel Langthim, Pixabay

Dès que j’ai remarqué le nid et un adulte dessus, je n’étais pas sûre que leur projet « bébés » allait tenir jusqu’au bout. Chez cette espèce, en journée, monsieur et madame couvent alternativement; mais seule la femelle s’occupe du nid, des œufs et des petits, la nuit. Je craignais pour les œufs et maintenant je crains pour les petits. Pourquoi ?

Au choix :

  • Nid tout petit, construit au bord d’une branche de l’arbre qui perd ses feuilles très tôt (il en a déjà perdu la moitié)
  • Cet arbre était avant le repère d’une famille de Pies. Les pies, que j’aime beaucoup, sont des prédateurs pour les petits oiseaux, les œufs et les bébés, uniquement quand elles ont à leur tour des petits à nourrir. Les petits oiseaux et les tourterelles peuvent avoir plusieurs nichées par an, les corvidés, une seule. Je donne cette explication que j’ai reçue pour « pardonner » aux pies leur régime alimentaire durant cette saison.
  • Nous sommes un quartier « à chats ». Rien que ma portion de rue et aux alentours de notre maison, il y a une dizaine de chats, stérilisés et identifiés (pas tous malheureusement), dont les nôtres, qui circulent librement.

Et de fait, alors que les petits ne sont pas encore nés, une pie, une seule, harcèle la tourterelle qui est nid. Généralement, deux fois par jour, au petit matin et le soir. (Peut-être aussi en journée, mais je ne suis pas présente tous les jours, en journée). La confrontation a été telle qu’une fois, la tourterelle, pour échapper à la pie, a foncé dans ma vitre ! Elle y a laissé la trace d’une aile. Heureusement, plus de peur – et de bruit – que de mal. Je pensais la nichée perdue. Mais non ! Quatre jours après ce choc, un premier bébé naît. Les bébés colombidés sont moches : gros bec disproportionné, gros yeux noirs, quelques plumes éparses et jaunes. Les attaques de la pie, quotidiennes, me font redouter le pire chaque jour. Le soir de la naissance, le nid est « déserté » suite au harcèlement de la pie. Heureusement, il fait encore chaud et le petit reste sans protection durant une bonne heure, les parents n’étant pas loin, veillent quand même à distance.

Photo : Felipé López, Pixabay

Le lendemain, le deuxième petit pointe le bout de sa tête ! Ils sont bien vivants et dynamiques.

Les petits sont seuls, le nid non couvé, de temps en temps. À chaque fois que je vois le nid non occupé par un parent, je regarde par terre, à la recherche d’une victime. Mais, après trois jours, les bébés sont toujours là, dans le nid. Ouf.

7h15 ce mardi 9 juillet 2024. Je quitte la maison pour me rendre à mon travail. Ce matin, en me levant à 5h, la maman était sur le nid. À 6h40, il n’y a plus d’adulte. Ils ne sont pas non plus à leur poste de surveillance : trois mètres plus loin, sur un câble, en hauteur. Je ne m’inquiète pas trop, j’ai pu voir au moins un des deux petits encore dans le nid.

7h15, je ferme la porte. Machinalement, je regarde par terre, puis ne voyant aucun bébé au sol, je lève la tête pour voir si un adulte n’est pas revenu. À l’instant où je constate que le nid est toujours « vide » de parents, j’entends du remue-ménage dans les feuilles. Je pense aussitôt à la pie qui embête une des deux tourterelles. Mais non. Un moineau sort du couvert des arbres, telle une fusée. À ses fesses, un autre oiseau plus grand, plus rapide qu’une pie. Cette scène se traduit par la chasse d’un épervier. J’en ai déjà vu plusieurs fois dans notre jardin, au-dessus de la maison, dans la rue capturant un pigeon. Le moineau a pris ses pattes à son cou et s’est enfui à une vitesse phénoménale. Il y allait de sa vie ! Le prédateur, d’abord deviné mais pas identifié clairement, s’est posé dans l’arbre voisin au « mien ». Là, je le vois. Un échange de regards. Un épervier. Magnifique. Majestueux. Pas très grand, à peine plus grand qu’un pigeon ramier. En moins bouboule, plus élancé. Torse moucheté de roux, yeux orange : c’est un mâle. Aucun doute. Le temps de profiter de cet instant, deux secondes à tout casser, et il est reparti à la quête de nourriture.

Photo : Gavin Tutt, Pixabay

Je souri. Je rayonne. Je le sais. Je suis tellement heureuse de pouvoir être témoin de ce genre de visite.

Et puis, je pense :  » Zut, il s’est peut-être fait les bébés tourterelles ! ». Deux heures plus tard, je ne le crois plus, car il n’aurait pas pourchassé le moineau. Mais peut-être qu’il n’a pas vu le nid à ce moment-là… Et moi, je suis partie, et je ne découvrirai ce qu’il en est que ce soir.

En voiture, le regard orange et vif imprimé sur mes rétines est légèrement chassé par le vol d’un héron cendré qui passe à moins d’un mètre de ma voiture.

Aucun doute, cette journée sera belle. Belle et exceptionnelle. Belle et extra.

Photo : Jack Bulmer, Pixabay

Il n’y a rien à faire, j’aime tous les oiseaux, mais je reste subjuguée par les rapaces, même quand ils chassent d’autres oiseaux ! 

Merci aux photographes de Pixabay qui me permettent d’illustrer les petits et grands héros du jour avec leurs sublimes photos.

Jeu d’écriture : expression qui se mange

Pour le mois de février, Fabienne et moi avons joué à un petit jeu d’écriture. Ce mois-ci, je nous lançais comme défi d’écrire un texte à partir d’une expression qui se mange. Fabienne a été bien inspirée, elle en a trouvé des expressions !

Texte de Fabienne

En ce temps-là, nous partagions le même studio mon frangin et moi :  Mon frère Arthur avait un cœur d’artichaut. Il tombait amoureux à peu près chaque semaine et se faisait larguer au bout de quelques jours . C’était vraiment une bonne poire !

Moi j’observais tout ça mi-figue mi-raisin en espérant que ça finirait par lui passer ou plutôt qu’il trouverait l’âme sœur ! J’en avais marre de recoller les pots cassés.

Je rêvais ! un beau jour, Arthur rentra à la maison le cœur en fête. Il avait rencontré la  » femme de sa vie » précisa -t-il. Une fille adorable en tous points mais la pauvre était à la rue s’étant disputée avec ses parents.  Pas bien grave, il allait la ramener chez nous, elle partagerait notre trois-pièces. Alors là, la moutarde me monta au nez, j’étais rouge comme une écrevisse.  J’explosai littéralement de rage :  » Et moi je compte pour des prunes !? il serait vraiment temps que tu mettes du beurre dans les épinards ! N’oublie pas que c’est moi qui paye le loyer, je suis aux petits oignons avec toi. Si tu ramènes cette fille, tu peux être sûr que ça va tourner au vinaigre et vous serez deux  à être à la rue. Tu veux le beurre et l’argent du beurre c’est ça ?  et vivre comme un coq en pâte avec ta dulcinée!  Il va falloir apprendre à ne pas manger ton beurre avant ton pain mon grand ! »  Après une telle tirade je pensais qu’Arthur renoncerait à ses beaux projets. Effectivement il retourna dans sa chambre et je ne l’entendis ni ne le vis guère durant le week-end. Le lundi quand je rentrai du boulot, je trouvai un mot sur la table qui m’était adressé :  » Ma vieille, contrairement à ce que tu crois je ne t’ai pas roulée dans la farine.  Bien au contraire, je t’invite à manger chez mes (futurs) beaux-parents où je me suis installé avec ma fiancée. »  Punaise, c’était la fin des haricots ! Mon frère avait bien tiré ses marrons du feu ! Je me mis à pleurer comme une madeleine, j’étais seuuuule ….


Quant à moi, j’ai eu du mal à démarrer. Je n’aurais pas dû lire le texte de Fabienne avant d’avoir écrit le mien ! Car je me suis retrouvée un peu bloquée. Finalement, ce n’est qu’au début du mois de mars, que l’ampoule s’est allumée dans ma tête : une idée !

Mon texte : avoir les yeux plus gros que le ventre

Je lève les yeux
Dans le ciel un rapace
Bientôt le printemps

Dans le ciel, un rapace. Il vole par à-coups. Périmètre de vol nettement déterminé. Il cherche à manger.

Dans le ciel, un rapace. C’est bientôt le printemps. L’hiver n’est pas parti. Le vent est froid. Mordant. Piquant. Cinglant.

Dans le ciel un rapace. Un rapace diurne. Un rapace affamé. Un rapace à observer.

Dans le ciel, un oiseau. Haut comme trois pommes, rapide comme l’éclair, l’oiseau a l’estomac dans les talons. Son dernier repas, une grive chétive, remonte à la veille.

Dans le ciel, un oiseau. Il est beau. Il est rapide. Il a faim !

Une expression humaine qui lui colle aux plumes : avoir les yeux plus gros que le ventre.

Dans le ciel, un oiseau. Un épervier. Un mâle. Chez cette espèce, les mâles sont plus petits que les femelles. D’habitude, c’est l’inverse. Ici, c’est un mâle. Aussi grand qu’un pigeon. En plus fin. En plus élégant. En plus coloré. Joues rousses. Yeux orange.

Sa spécialité : la chasse aux petits oiseaux. Son régime alimentaire est composé à 98% d’oiseaux ! De petits à moyens, jusqu’à des piafs plus grands que lui ! En matière de vol, de maîtrise du vent, de navigation, de connaissance du gouvernail, il sait y faire.

Pas très haut dans le ciel, le bel épervier a remarqué sa proie. Un pigeon. Domestique. Banal. La future victime est aussi grise que lui. Le pigeon, qui lui est un estomac sur pattes, grignote à tout bout de champ. Ce pigeon-ci ne fait pas le fin bec. Il a trouvé par-là, sur la rue, quelques miettes à manger. Miettes et restes balancés négligemment par la porte d’une voiture.

Au sol, tout à son affaire de nettoyeur de rue, le pigeon ne prête aucune attention au danger qui vient d’en haut. Un œil de chaque côté de la tête, il regarde de temps en temps ce qui se passe à son niveau, tantôt à gauche, tantôt à droite.

Sur les trottoirs, dans un arbre, des pies. Sur les trottoirs, dans un arbre, sur des branches dénudées et coupées, quelques pies observent, curieuses, la scène de la Vie. Les arbres des alentours font d’excellents perchoirs. C’est comme au cinéma, mais en plein air. C’est comme au cinéma, mais en direct. C’est comme au cinéma, mais sans caméra. Et les acteurs et les actrices sont de véritables oiseaux en chairs et en plumes.

Sur les trottoirs, dans un arbre, les pies vont-elles assister à un navet ?

Nous avons dans les airs, un épervier affamé. Nous avons dans la rue, un pigeon glouton. Nous avons dans les arbres, des pies qui jacassent.

Les pies jacassent comme seuls les corvidés savent si bien le faire. Les corvidés, la famille des plus grands passereaux : bec costaud et pattes robustes les caractérisent. Les corvidés, qui vont de la pie, en passant par le geai, jusqu’au corbeau, sont plus d’une centaine d’espèces. Ce sont sans doute les oiseaux les plus intelligents, les plus joueurs, les plus fascinants à observer, à étudier. On pourrait même les apprivoiser.

Dans l’arbre, des pies. Elles sont trois. Elles patientent. Elles attendent. Elles tuent le temps. Elles poireautent et font des pronostics :

  • Trois contre un pour l’épervier, dit l’une.
  • Pour sûre, ce pigeon va bientôt manger les pissenlits par les racines, enchérit une autre.
  • C’est la fin des haricots pour lui, conclut la troisième.

À force de parler nourriture à tout va, une corneille qui passait par là les interrompt le plus poliment du monde :

  • Mesdemoiselles, vous m’en donnez l’eau aux mandibules. De qui, ou de quoi parlez-vous ?

Les pies et les corneilles ne s’entendent pas toujours. Un peu comme « chien et chat ». Parfois, ça cause ensemble, parfois ça se vole dans les plumes. Parfois, c’est pire. Mais ça, c’est une autre histoire.

  • Oh, ça va, l’asperge ! Ne ramène pas ta fraise ici. Cela ne te regarde pas !
  • Ouais, c’est pas tes oignons. Dégage !
  • Du balai, ouste, espèce de charbon de bois mal dégrossi !

Les pies n’ont pas leur langue dans leur bec. La corneille est vexée. La discussion part en sucette. Elle n’a rien vu venir. Elle ne leur a strictement rien fait, si ce n’est leur adresser la parole. Vexée, elle s’en va à tire d’ailes. Elle ne tient pas à pleurer comme une madeleine devant ces pimbêches grossières et mal élevées.

Malheureusement pour elle, la corneille s’est tirée un rien trop tôt. La plus fabuleuse des scènes d’action de ce cinéma en plein air commence… maintenant !

Ni vu ni connu, l’épervier, que rien de tout cela n’a perturbé, a replié ses ailes, a foncé pattes tendues, serres écartées sur son objectif. Aussi vif que l’éclair, aussi précis qu’une calculatrice, aussi déterminé qu’affamé, il n’a laissé aucune chance à sa proie.

PAF ! Les serres pointues se sont enfoncées dans sa nuque et dans son dos.

PAF ! Le bec crochu et puissant a brisé la colonne cervicale. 

PAF ! Le pigeon est mort. Rapidement. Presque sur le coup. Les haricots sont cuits pour lui. Cuic-cuic.

Les pies en restent bec bé :

  • On peut pas repasser la scène au ralenti ? Parce que non, quoi, j’ai pas bien vu, dit l’une, en faisant des yeux de merlan frit.
  • Punaise ! dit une autre, le pigeon n’a pas l’air dans son assiette !
  • Aïe, vlà une bagnole. On remet ça ? Qui parie ? Deux crêpes pour le prix d’une ? dit la troisième qui évalue déjà les chances du rapace de s’en sortir… ou pas.

En effet, une voiture arrive au loin.

Malheureusement pour le spectacle des pies, et pour leur pari, c’est une conductrice amoureuse des oiseaux qui est au volant de l’engin roulant.

Avant que la voiture ne freine, une des bavardes envoie une vanne pas piquée des vers :

  • L’épervier est comme qui dirait tombé sur un os.

Et les trois pies de rires à gosier déployé.

Pendant ce jacassement à casser les oreilles, l’épervier a vainement tenté d’emporter sa proie. Hélas, l’expression « avoir les yeux plus gros que le ventre » se vérifie pleinement ici. Les pattes puissantes du rapace et les coups d’ailes tout aussi puissantes n’arrivent même pas à décoller le pigeon ensanglanté de la rue. La proie est bien trop lourde pour le frêle épervier. Ce dernier est obligé d’abandonner son butin sur place.

Ce n’est pas demain la veille que notre rapace prédateur d’oiseaux prendra de la brioche !


Je voulais vous mettre une photo de l’épervier que j’avais faite après être rentrée et avoir déposé mes affaires. La scène à laquelle mon fils et moi avons assistée pour de vrai (j’étais la conductrice de la voiture dans le texte) s’est déroulée à une trentaine de mètres de notre maison, dans notre rue. J’ai donc mis quelques minuscules minutes à rentrer, déposer mes affaires, prendre mon appareil photo et ressortir à pied. J’ai donc cru naïvement que le rapace qui était dans le ciel à voler en décrivant de larges cercles au-dessus de la proie morte, était « notre » épervier. Comme les photos n’étaient pas géniales, jamais l’oiseau ne s’est posé ou est descendu à un niveau suffisamment bas pour faire une belle prise photographique, je n’ai pas téléchargé les photos sur mon ordi. Jusqu’à ce jour où j’ai écrit le texte. Et là, une grosse surprise m’attendait !! J’ai d’abord cru que j’avais la berlue. Que je m’étais trompée en identifiant le rapace devant ma voiture. Heureusement, je n’étais pas seule. Mon fils m’a dit deux choses quand je lui ai demandé s’il se souvenait du rapace observé quelques jours plus tôt :

  1. c’était bien un épervier (moi je pensais à un mâle à cause de la taille, mais lui me certifie que c’était une femelle à cause des couleurs grises)
  2. il y avait sans doute deux rapaces ce jour-là, deux rapaces différents !

En effet, cette affirmation ne m’a pas effleuré l’esprit. Obnubilée que j’étais sur le rapace dans le ciel, jamais je n’ai pensé une seule fois qu’il pouvait y avoir un autre rapace intéressé par le pigeon, par la proie…

En photo donc, un Faucon pèlerin !

La preuve que je n’y pensais pas, j’ai renommé toute la série des photos « épervier Mehagne » ! Ci-dessous des liens vers un super site d’oiseaux pour vous montrer la différence. En visionnant mes photos, j’ai remarqué en effet le masque noir sur la tête de l’oiseau et la forme de ses ailes, qui ne correspondaient pas à celle de l’épervier !

L’Épervier d’Europe sur le site oiseaux.net

Le Faucon pèlerine sur le site oiseaux.net

Cela me fait penser au conte « L’Épervier et le Vautour » de Allassane Sidibé, que j’ai adapté à ma sauce et conté pour la première fois l’année passé.
Clic ici pour entendre ce conte avec la voix d’Allassane.

Mon livre pour l’Aquascope de Virelles

Je reviens enfin avec des nouvelles sur la parution prochaine de mon recueil « Démarrer au quart de tour ». Ce livre, dont l’entièreté des bénéfices sera reversé au C.R.E.A.V.E.S. de l’Aquascope de Virelles, sera édité chez Atramenta.  (mon recueil à vendre devrait apparaître sur cette page d’ici une semaine je pense)

Après plusieurs corrections pour une meilleure mise en page, je peux enfin vous dire qu’il va être imprimé tout bientôt. J’ai changé de photo de couverture car sur la première photo, la coquille de l’escargot était trop « brûlée », on ne voyait pas les détails de sa coquille. Ici, l’escargot démarre au quart de tour lui aussi, car il ne faudrait pas qu’il loupe son superbe saut !

escargot-recueil-2

A quoi servira l’argent récolté ? Le Centre de Revalidation de l’Aquascope de Virelles héberge depuis plusieurs mois maintenant un rapace magnifique, puisqu’il s’agit d’un Grand duc d’Europe, le plus grand rapace nocturne de nos régions. Vilainement blessé par des fils de fer barbelés, il ne retrouvera jamais ses pleines facultés de prédateur, le tendon de son aile droite ayant été irrémédiablement atteint. Pourtant, personne ne veut prendre la décision d’euthanasier cette superbe femelle. Pourquoi ne pas lui construire un nouvel abri, à sa mesure, à l’entrée du Centre de Revalidation ? Sa présence renforcerait l’action de sensibilisation de l’Aquascope Virelles auprès du public jeune et nul doute qu’elle deviendrait la mascotte du Centre de revalidation, de par sa beauté altière et son envie de vivre. C’est à cette construction et ce projet que nous voulons consacrer le bénéfice de la vente de ce livre.

Pour que cet espace puisse voir le jour, je vous encourage à partager mon action en faveur de ce centre de revalidation.

Le livre (format A5 – 196 pages) sera vendu au prix de 12 euros (hors frais d’envoi). Pour chaque livre acheté directement chez Atramenta, 3 euros seront reversés au CREAVES de l’Aquascope Virelles. Si vous souhaitez passer par moi (Belgique) (dédicace et marque-pages sur demande) et si j’obtiens plus de 25 pré-commandes, je pourrais reverser 4 euros par livre ! Si, sait-on jamais, j’ai 50 commandes et plus, le bénéfice pour ce Centre de Revalidation sera de 5 euros par livre ! Pour cela, il faut que j’ai vos commandes et paiements avant de pouvoir recevoir puis vous renvoyer le(s) livre(s). Le délai sera donc un peu plus long, mais l’argent récolté sera aussi plus rapidement important.

Je mettrai sur ce blog l’évolution des commandes, des paiements et des bénéfices reçus.

Pour vos commandes, infos, ou autres : une adresse mail (clic clic)

Un tout grand merci pour votre confiance, votre lecture, votre encouragement, votre participation.

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Une histoire de lapin

Pour rester « dans les lapins », voici une de mes histoires publiée dans mon dernier recueil
L’idée de ce texte m’est venue en regardant les magnifiques photos de Benoit Henrion. Voici celle qui m’a inspirée.

 

C’est l’hiver, il fait froid et il neige.

Madame Valeria a faim. En tournoyant dans le ciel, elle a repéré une tache sombre sur la terre blanche. Cette tache ne bouge pas, mais un délicieux fumet de lapin semble venir d’elle.

— L’avantage avec la neige, dit-elle, c’est que les proies se voient plus facilement.

L’année passée, Madame Valéria a fait une mauvaise expérience. Elle s’était laissé tenter par un animal mort, et après l’avoir mangé, elle avait vite eu mal au ventre. La douleur était très forte, mais heureusement, grâce à des Bipèdes, elle a eu la vie sauve. Ils l’avaient emmené dans un centre où on soignait des animaux comme elle. Et bien qu’elle ne parle pas la langue des Bipèdes, elle avait retenu le son « poison » et avait très vite compris que les gens qui s’occupaient d’elle étaient très fâchés après ce mot.

Depuis ce jour, elle attend toujours un peu avant de fondre sur un cadavre. Elle patiente pour voir si un autre animal, intéressé par cette viande, allait se tordre de douleurs après l’avoir touchée.

— Alors, que font-ils ? Qu’on ne me dise pas qu’à cause de la neige, aucune corneille ne sort de chez elle ou qu’aucun rat n’est tenté par ce festin ? grommelle-t-elle dans son bec.

Une demi-heure plus tard, un gargouillis se fait entendre et Madame Valéria toise son ventre :

— Tu vas avoir à manger, je te le promets, lui répond-elle.

Elle termine à peine sa phrase quand, tout à coup, son ouïe détecte la présence d’un rival.

— Une autre buse ! siffle-t-elle. Elle va me piquer mon lapin !

Aussitôt, elle décolle de son perchoir et se pose non loin du gibier.

L’autre rapace arrive en même temps, et celui-ci, pattes bien tendues, ouvre ses ailes en grand pour s’imposer.

Face à cette posture d’intimidation, Madame Valéria se fait toute petite.

« Vas-y mon coco, goûte-moi ce lapin et dis-moi s’il est bon », ricane-t-elle en son for intérieur.

Madame Valéria réalise soudain que, quelle que soit l’issue de ce combat qui semble inévitable, elle va en ressortir perdante.

— Si ce lapin est bon et que je ne gagne pas le combat, je n’aurai que les restes et si l’autre crie « au poison » ou se plie en deux, je n’aurai rien à manger, l’un comme l’autre, c’est fichu, dit-elle tout bas pour ne pas que l’autre puisse l’entendre.

Les deux oiseaux sont de taille identique, mais son rival semble être en meilleure forme physique, car il n’arrête pas de hurler, ailes ouvertes.

La guerre pour le lapin a commencé. Madame Valéria est impressionnée par la position de force de l’autre. Il siffle, ses yeux sont menaçants et il avance d’une démarche sûre. Elle n’a pas d’autres choix que d’accepter le conflit.

Madame Valéria se ramasse sur elle-même et bondit sur son rival toutes serres tendues. Puis, elle ouvre ses ailes aussi pour garder un meilleur équilibre.

Les deux grands oiseaux ne sont plus que deux masses brunes, mélangées. On reconnaît juste Valéria par son poitrail un peu plus clair, et mis à part ce détail, on pourrait presque les prendre pour des jumeaux.

— Il est à moi ce lapin, va-t-en voleuse, lui crache l’autre en plein visage.

— C’est faux, c’est moi qui l’ai vu en premier !

— Ah oui ? Et pourquoi as-tu attendu que je me pose pour venir ramener ton bec ?

— C’est que…

Valéria n’ose pas lui avouer qu’elle craint qu’il ne soit empoisonné. Alors, elle réfléchit à sa réponse et lui dit :

— En fait, j’avais un peu froid et l’idée de mettre mes pattes dans toute cette neige ne m’encourageait pas à aller le chercher si vite, mais quand tu es arrivée, je ne voulais pas le voir partir sous mes yeux, alors je me suis imposée.

À tout expliquer de la sorte, Valéria baisse sa garde et reçoit un violent coup de patte dans le ventre.

— Ouch ! Quel coup bas ! Je pensais qu’on pouvait trouver un terrain d’entente, mais visiblement, tu n’es pas prêt à écouter ma proposition, lui dit-elle en retrouvant son souffle.

— Que le meilleur gagne, ricane-t-elle.

En un rien de temps, Valéria se retrouve le dos dans la neige avec une serre puissante sur son ventre. Elle croit qu’elle va perdre un œil ou avoir un vilain coup de griffe, mais tout à coup, son rival penche sa tête sur le côté et la regarde d’un drôle d’air.

— Alors, je te plais vue sous cet angle ? lui demande-t-elle en fermant un œil.

Profitant de ce doute, elle se redresse tout aussi soudainement qu’elle était tombée, déstabilisant son adversaire. Celui-ci, de tout son poids, s’enfonce dans la terre et se retrouve avec de la neige jusqu’aux genoux, limitant ainsi fortement ses mouvements.

Ils sont à égalité. Chacun a marqué un point dans cette bagarre de proie.

Valéria, toujours obnubilée par le risque éventuel de poison dans le lapin finit par proposer un arrangement au mâle.

— Écoute, visiblement, tu es plus fort que moi. Je te propose ceci. Tu peux commencer à te servir, mais tu me laisses la moitié. Tu peux choisir les meilleurs morceaux. Je n’ai pas envie de continuer à dépenser de l’énergie dans ce combat par un froid pareil. Qu’en dis-tu ?

— Hum ! Très juste. Tu as bien évalué ton adversaire et tu as entièrement raison. J’accepte ta proposition. Et parce que je suis galant oiseau, je te déposerai le reste du lapin au pied de l’arbre rouge dans la forêt, ainsi tu n’auras plus les pattes gelées.

— Oh ! Quelle délicieuse attention, merci à toi.

Ainsi, Valéria a-t-elle finalement gain de cause. Certes, elle ne va pas pouvoir profiter de la partie la plus tendre du lapin, mais elle sera définitivement fixée quant à la qualité de ce met délicieux. Et vu comment l’autre rapace le dévore goulûment, elle attend impatiemment son morceau. Elle s’en lèche déjà le bec.