Balade du matin 28/08/2025
Je longe la berge, le pas tranquille.
D’abord, une silhouette brune qui glisse sur l’eau, une canne colvert, solitaire.
Rien d’un castor, juste la vie ordinaire du rivage.
Puis, soudain, un éclat turquoise, vif comme une flèche :
le martin-pêcheur fend l’air et disparaît déjà,
me laissant ce battement de cœur surpris.
Un peu plus loin, au milieu des pigeons ternes,
une présence claire attire mon regard :
la mouette rieuse, éclat pâle au-dessus des reflets sombres.
Le gris me fait penser à mon ami, je cherche le héron.
Mon regard s’accroche à une masse couleur de pierre, figée sous le pont.
C’est lui, le maître de la patience,
fondu dans l’ombre comme un fragment de roche vivante.
Autour de moi, le grondement des machines et des moteurs
enveloppe le fleuve d’un manteau sonore pesant.
Alors je m’arrête.
Je respire le temps présent un peu trop pollué
Sous ce ciel gris bleuté, uniforme comme une toile lavée,
et j’attends, immobile comme une statue.
Le héron s’est envolé,
il déploie ses ailes longues, ardoisées,
et s’élève lentement.
Sa place vide appelle aussitôt une autre visiteuse :
la mouette revient, légère, se poser sans un cri, à sa place.
Le vent se lève,
il froisse l’air,
les nuages s’épaississent, lourds comme du plomb clair.
Une odeur de pluie flotte un instant.
Je crois bien que nous allons être trempés…
Mon regard porte au loin : un mouvement sur l’eau attire mon attention.
Un oiseau plonge, sombre éclat furtif.
Trop loin pour l’identifier.
Je retiens mon souffle, espérant qu’il remonte près de moi.
Mais il s’éloigne,
et je reste dans l’incertitude : grèbe au cou roux ? cormoran au plumage lustré ?
Le doute m’accompagne et je ne pourrai trancher, il restera non identifié.
Devant moi, sous la surface, de petites têtes argentées percent l’onde,
redescendent aussitôt,
laissant derrière elles des cercles,
de fins dessins mouvants, offerts à mon regard curieux et amusé.
Des cris au-dessus de moi.
Je relève les yeux :
neuf bernaches du Canada traversent le ciel,
plumes sombres et poitrines claires,
leur formation résonne comme une phrase en plein vol.
Elles parties, une bergeronnette jaune, rapide,
tranche l’air d’un éclat vif dans l’autre sens,
avant de disparaître aussi vite qu’elle est venue.
Je poursuis le chemin.
Le rivage se peuple :
mouettes éclatantes par-ci, par-là,
cormorans noir de jais au loin, certains se sèchent ailes ouvertes,
canards aux teintes sombres et mates,
poules d’eau au bec rouge et jaune,
une bergeronnette grise sur le bord d’une pierre, éclair délicat de noir et blanc,
puis, encore un autre héron, plus en retrait, m’offre son dos,
et arrive en cancanant tout un cortège de bernaches.
Parmi elles, deux oies différentes,
plus claires, plus menues,
pattes d’orange vif qui tranchent dans le groupe.
Soudain, un cri aigu fend le silence.
Deux appels secs, presque métalliques.
Je scrute, je cherche…
et les voici : deux chevaliers guignettes,
de la taille de « nos » merles bien connus,
brun clair avec une ligne blanche sur les ailes, filant au ras de l’eau.
Leur vol est bref, saccadé,
mais mon cœur s’emballe :
c’est eux que j’attendais, eux que j’espérais.
Alors je souris,
et je laisse cette matinée m’imprégner tout entière :
ses bruits, ses couleurs, ses présences.
Et quand je rentre, je réalise :
pas une seule goutte de pluie n’est venue délaver
mes souvenirs gais.

Face à la gare d’Angleur, le long du Ravel 5
Ce matin, les oiseaux m’ont rappelé que les fissures du ciel laissent toujours passer la lumière. C’est ce chemin que je propose : marcher, observer, écrire, et laisser émerger sa propre clarté.
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