Être de mauvais poils

Hier, dans le train, le comportement d’une dame m’a fait sourire… et pas que moi.

Alors que nous arrivions à destination et que nous nous appretions à descendre, une dame qui visiblement avait une formation ou réunion dans un bulding, dit à un homme qui je suppose devait être un collègue : « Ah ! Voici mon magnesium, j’ai besoin de magnesium, car je suis de mauvais poils aujourd’hui », la dame se retourne légèrement et sourit à une autre navetteuse juste devant moi, elle poursuit : « C’est une très bonne excuse, oui je sais, mais le chocolat à ses vertus, et j’aime le chocolat. »

La navetteuse sourit et approuve cette bonne excuse. Moi aussi !

Tranche de vie d’un navetteur

La semaine passée dans le train… un navetteur pas comme les autres. Ils sont tous différents, nous sommes tous différents… parfois l’un ou l’autre attire mon attention, comme ce jeudi matin passé…

J’écris tout de go, j’écris comme ça se passe, sans notion de justesse, mais plutôt dans le détail des retranscriptions…

Homme d’une 70aine d’années je dirais… marche avec difficultés, s’aidant d’une béquille… ne semble pas très propre sur lui avec un pantalon noir, aux multiples poches, jauni par endroits, chiffonné de partout, comme son visage.

Casquette noire vissée sur sa tête, barbe et moustache blanche et jaunie par un cigarillos (éteint, je fais gaffe à ce qu’il n’allume pas) collé à ses lèvres. Lunettes avec des verres assez épais. Parle d’une voix forte… ouvre sa canette de bière à 7 heures du matin… précise qu’il va bouffer dès qu’il arrive à Ostende… que hier il a voulu engloutir des moules mais pas moyen d’en trouver…

Il lit le journal et passe la moitié à son voisin d’en face qui le lui demande…

A 7h30, juste avant le 1er arrêt, des relents de bière mélangés à la cigarette arrivent jusqu’à moi, juste un siège et un couloir me séparent de ce parfum écœurant.

Il a fini son journal, alors il sort son petit carnet de mots fléchés ou mots croisés… il se frotte le genou droit, il doit avoir mal…

Ses ongles sont longs, légèrement courbés vers l’intérieur, prolongeant le bout des doigts, jaunes et noirs… Le bic dans sa main droite est tenu par 2 doigts, presque avec le poing fermé, serré… des doigts remplis d’arthrose tordus par la douleur de la vie.

Je « l’aurai » jusqu’au bout… logique car il descend plus loin que moi… Avant que son voisin navetteur ne se lève pour se préparer à descendre au prochain arrêt, il l’informe que lui aussi travaillait avant. Il était dans les ascenseurs, son dernier boulot était à Bruxelles et quand il a terminé, le dernier jour, son chef l’a raccompagné jusque chez lui en voiture. Oui, il l’a raccompagné jusqu’en voiture (il répète… il devait apprécier son patron)

Il montre sa béquille et précise qu’il l’a payée 100 euros, c’est parce qu’il s’est tordu le genou. Au début, il louait 1,50 euro par jour, il valait mieux l’acheter vu qu’il l’utilise tous les jours.

Oui, il se promène beaucoup maintenant, il aime ça.

Grosse veste au motif quadrillage. Un petit sac brun en bandoulière sur son épaule… genre cuire ou simili cuir, foulard aux motifs taches de léopard enroulé autour de son cou.

Quand personne ne lui répond, il fait silence… mais l’odeur est toujours là… m’incommode… l’inconvénient des transports en commun, on ne peut pas « fuir » si on veut garder sa place lolll

Il n’est pas méchant, juste un peu seul et un peu sourd pour parler si fort… Il me fait beaucoup penser à mon beau père qui est décédé : surtout quand ce navetteur a lâché pour une raison que j’ignore (je n’ai pas tout entendu) : « je vais lui péter la gueule » ! ça c’était tout à fait le style de mon beau-père (le second mari de ma maman), qui, quand il avait un peu trop bu accompagnait le geste à la parole même s’il ne tenait plus trop sur ses quilles et était sujet de railleries de la part des jeunes « frappes » du quartier.

Voyager en train, toute une histoire

Mes voyages en train ne se ressemblent pas. Il n’y a pas un jour qui soit exactement pareil à un autre ! Quand je suis fatiguée mais que je ne veux pas dormir par peur de louper mon arrêt, ou quand je viens de finir un livre et que je ne veux pas en lire un autre juste après pour garder encore quelques heures, un jour ou deux, l’histoire dans ma tête, dans ma peau, je me mets à observer les gens.

Un jeu d’écriture existe où il faut décrire un moment ou une personne sans rien inventer, dire simplement les choses telles qu’on les voit. Un exercice pas si facile qu’il n’y paraît car on met toujours des suppositions, on croit ceci ou cela.

La coïncidence a voulu que le même jour je me suis exercé à ce petit jeu. A l’aller je venais de finir un livre, au retour, j’étais fatiguée. (à lire ultérieurement sur ce blog)

Dans la même semaine, trois jours plus tard, alors que j’ouvrais un nouveau livre, il y a eu quelques échanges de mots entre 2 hommes, juste devant moi. La plupart du temps, pour me couper du monde qui grouille tout autour de moi, pour me plonger complètement dans un livre (et dans ma petite bulle), je mets de la musique dans mes oreilles. Il suffit qu’il y ai trop de monde (l’heure de pointe débute à 7h !) et que je ne trouve pas une place que j’aime bien, pour que des gestes, une sensation électrique, une tension, perturbe mon attention. Avant même d’enlever mes écouteurs pour entendre la raison de leur différent, je savais qu’ils n’étaient pas contents et que « ça » râlait sec.

J’emprunte tous les jours le train, et je pourrais presque vous raconter une anecdote quotidienne.

Un jour, je me surprends à trouver mignon deux hommes qui se draguent, car faire la cour, séduire, toucher la corde sensible, attirer l’attention de l’autre, que l’on soit de sexes opposés ou du même sexe, c’est la même « procédure » ;-)

Un autre jour, ma voisine est une institutrice primaire qui corrige des exercices (ou une interrogation), et je suis étonnée de découvrir autant d’écritures différentes chez des élèves d’une même classe, de même âge.

Un autre jour encore, sur le chemin du retour, des voyageurs se retrouvent. Ils se connaissent, car ils « réservent » les places sur les sièges de 4. Ils rigolent, ils parlent fort, ils échangent des souvenirs de voyage. J’aime entendre des commentaires d’habitués comme : « Oh, on est à l’arrêt, j’espère que ça sera rapide, pas comme la dernière fois où on est resté coincés plus d’une heure. » Le tout dit dans la bonne humeur, avec un sourire ou un rire qui appelle un autre souvenir à partager.

Parfois, moins drôle, c’est autre chose qui me perturbe, pas besoin d’enlever mes écouteurs ou de lever les yeux pour sentir le vomis d’une personne malade qui n’est pas arrivée à temps à la toilette. J’ai un odorat très sensible, beurk…

Il y a aussi les enfants, les bébés, qui crient et qui courent dans le wagon…

Mais il y a aussi des gens, comme moi, qui s’enferment dans leur bulle. Un jour, au retour, je m’installe sur un fauteuil côté fenêtre où il y a 2 places. Je roule à l’envers, mais cela ne me dérange pas dans le train, je n’ai pas le mal de transport (ouf). Au moment où je mets mon sac à dos à côté, que je lève la planche pour mettre mon petit et vieux pc portable et que je choisi ma musique, mon champ visuel périphérique capte une similitude : de l’autre côté du couloir, à la même rangée que moi aussi installée côté fenêtre, une jeune femme. Mon double : la trentaine, cheveux châtain mi-longs rangés dans une couette, jeans bleu, basket, chemise à carreaux, sac à dos, et pc sur tablette ! Physiquement, elle ne me ressemblait pas, mais on avait le même style vestimentaire, la même façon de ranger nos cheveux, la même idée pour passer le temps dans ce voyage en train. Une autre habituée… qui tapait aussi à l’aveugle sur son clavier ! ça fait bizarre quand même, presque effet miroir :-)

D’habitude, le matin, il y a 3 catégories de voyageurs dans mon wagon : les dormeurs (la moitié), les lecteurs et les travailleurs sur pc. C’est très calme, je ne dois parfois même pas mettre mes écouteurs sur mes oreilles.
Le soir, enfin au retour, l’après-midi car je finis tôt, c’est différent : quelques dormeurs, des profs, des étudiants, des lecteurs, des voyageurs occasionnels, c’est moins calme.

Je me dis parfois qu’il y a peut-être des gens avec lesquels je vais finir par lier connaissance… mais tout ce bruit, tous ces gens, tout ce monde, tout ce brouhaha, tous ces empressements,… je ne suis pas sûre de m’y habituer un jour !

Au début, je me mettais en « arrière », j’attendais que tout ce monde pressé rentre dans les wagons… mais alors, je n’avais pas toujours une place assise ! J’ai compris que les places sont précieuse, ceux qui gagnent sont ceux qui visent juste… faut que le train arrive pour voir toutes ces fourmis se presser sur le bord du quai, calculer l’endroit approximatif où les portes du wagons s’ouvriront… le matin, c’est horrible comme sensation. Il n’est pas 8 heures que tu dois déjà te battre pour avoir une place assise dans ton train.

Voilà, je voulais partager avec vous ces quelques mots :-)