Un mot qui change tout

Je lis tous les soirs. 20, 30, 45 ou 60 minutes et parfois au-delà. C’est mon somnifère, mon médicament naturel pour dormir. Hyper efficace, sans aucun effet secondaire, si ce n’est parfois, du mal à refermer un livre… Préparation magistrale, exceptionnelle, elle est disponible tout le temps et à portée de main.

Sauf que voilà, parfois, la journée a été longue, plus difficile, et je lis parce que je ne peux pas m’en empêcher. Il arrive dès lors que je lise trois fois la même phrase ou que mes yeux mélangent les lettres. Le résultat est toujours surprenant.

Tenez, hier soir, par exemple. Avec ce livre :

Lire cercueil au lieu de recueil et le tour est joué.
Livre : L’appartement du dessous, de Florence Herrlemann, page 131
– (…) Je vous ai choisi un cercueil de nouvelles.
Ma version enrichie, mon cerveau fatigué, mais néanmoins rebondissant :

Il y avait là, sur toutes les parois du cercueil, jusqu’à son couvercle intérieur, des pages et des pages de nouvelles. La défunte était une mordue des nouvelles, elle lisait, chaque matin, pas moins de huit journaux quotidien. Elle comparait les articles, les informations, les nouvelles, les titres. Ses proches ont donc eu l’idée de décorer son cercueil avec toutes les annonces de sa nécrologie parues dans les différents journaux qu’elle achetait. Comme un clin d’oeil pour leur mère, grand-mère, arrière-grand-mère, amie, histoire qu’elle ne s’ennuie pas dans Leaudela, qu’elle ai de quoi se mettre sous le dentier durant ses longues journées, interminables, allongée.

Une lettre change tout

Livre ❤️

Delphine De Vigan : No et moi.
Page 137.


Lecture du soir, trop tard.
 » (…) Assise à côté d’elle je découpe des morts dans les journaux pour les coller sur mon cahier, (…) »

Une lettre change tout le sens de la phrase. Une lettre, une seule, et l’histoire entière change.

Lancée dans ce délire, à la nuit tombée, je fabule une suite à ma sauce.

Des morts dans les journaux. Découper des morts. Des cadavres. Tout froid. Tout rigide. Ou pas. J’en sais rien en fait. De la rigidité cadavérique. Je sais juste qu’elle arrive vite après le décès, mais c’est pas instantané, immédiat. Y a un délai. Et puis après, elle est plus là. Partie.
Découper des morts, ça doit quand même pas être facile. C’est comme de la viande. Un gros morceau de viande. Et moi, j’suis végétarienne. Heureusement, ces morts, ils sont dans les journaux. En toutes lettres. Parfois, déjà encadré, un cercueil de papier, sans épaisseur, sans vie, froid. Le papier est froid. Le journal est froid. La mort est froide. Les mots morts sont froids.
C’est l’hiver. Alors, pour me réchauffer, je vais brûler le cahier des morts. Le papier sera chaud. Brûlant. Fiévreux. Comme les morts avant de mourir.


Il faut bien sûr lire « … je découpe des mots dans les journaux… »

Ce n’est pas de la dyslexie, mais lire trop vite

L’on a cru un instant que notre fils était dyslexique, car il inversait certaines lettres, certaines syllabes. Puis, je me suis souvenue d’un épisode parmi d’autres, quand j’étais moi-même à l’école. Je devais avoir 13 ou 14 ans, à l’examen de géographie, il fallait écrire les noms des pays et de leur capitale sur une carte muette. Je ne me souviens plus précisément l’erreur, mais en hésitant sur deux capitales pour un seul pays, j’ai écrit le début de la première capitale avec la fin de la seconde… et je ne m’en suis absolument pas rendu compte jusqu’à ce que mon professeur m’en fasse gentiment la remarque.

Presque quotidiennement, je lis un livre à voix haute à mon fils. Et dans le tome 2 des « Chroniques des marais qui puent », j’ai dit sûre de moi et distinctement :

Le chaton du barreau cornu 

Il aurait fallu comprendre (et mon fils a inversé sans le moindre problème, car il était tout à fait dans l’histoire) Le château du baron cornu  :-)

Je devais être fatiguée… la bonne excuse ha! ha!

Lire de travers

La fatigue ou le fait de penser à 36 choses à la fois fait que ces derniers jours, j’accumule des erreurs de lecture !

Hier déjà, avec l’expression « peigner la girafe » qui devenait « peindre la girafe » et ce matin, en lisant une BD, encore une autre expression mal lue : « en voir des vertes et des pas mûres », devient « en voir des verbes et des pas mûres ».

Mon fils doit étudier les verbes pour l’école… d’où ma lecture de traviole !

Et en parlant de mon fils, il a hérité de sa mère pour inventer un nouveau mot qui n’existe pas à partir de 2 mots qui se ressemblent, qui sont synonymes. Je ne sais plus ce que c’était, mais je sais que je ne l’ai pas repris, car pressée de parler ou d’écrire quelque chose, je faisais la même chose que lui à l’école. Exemple : un visagure : un visage, une figure… on hésite quel mot utiliser et du coup, notre cerveau fait un melting pot et notre bouche ou notre main fabrique un nouveau mot qui n’existe pas… même si on comprend le sens de la phrase, le prof met un zéro pour cette invention !