Être ailleurs et maintenant grâce aux mots

Les mots écrits, dits, vivants, d’encre et de papier ou de pensée sont puissants. On ne le dira jamais assez, mais lire et écrire sont des thérapies, des refuges, des amis, des voyages, des médicaments, des confidents.

Mon médecin s’étonne que j’ai toujours une tension basse. Mais comment voulez-vous que cela en soit autrement avec 4 chats à la maison et deux heures de lecture par jour (rires). La ronronthérapie, je la pratique quotidiennement. Caresser un chat permet à l’humain de diminuer sa tension artérielle, de se relaxer, de baisser son rythme cardiaque, de réduire le stress. Ces propriétés pas si magiques que ça, on les retrouve dans la lecture. Lire 6 minutes par jour permettrait tout ça (lire 6 min/j réduit le stress de 68%). Alors, imaginez-vous avec deux heures de lecture + des câlins à mes chats : zéro stress, plus aucune tension, ou juste le minimum pour vivre calmement :-)

Ces dernières semaines, je lis énormément. Dès qu’un livre me plait, je lis dès que je le peux, n’importe où, n’importe quand et généralement, après deux ou trois jours (moins de deux heures parfois), le livre est fini. Je ne laisse même pas l’histoire reposer en moi 24h que j’entame déjà un autre livre. Mes lectures sont variées, ça va de la littérature jeunesse, en passant par un policier, thriller, feel good, développement personnel, etc. Mes objectifs quand je lis sont l’évasion, la déconnexion totale, l’espoir, l’intrigue, la curiosité et l’apprentissage. Il m’est arrivé de lire 20 ou 70 pages et de refermer le livre, car pour une raison ou une autre, je ne « rentre » pas dedans. En fonction de ce que j’ai ressenti en lisant ces quelques dizaine de pages, le livre rejoint la pile « à donner » ou « à vendre », celle pour ma fille qui lit aussi beaucoup ou ma PAL (Pile À Lire).

En me plongeant dans ces univers et ces mondes pour la plupart imaginaires, fantastiques, inventés mais pas si déjantés que ça, je ne suis plus « ici et maintenant ». Je suis plutôt ailleurs. Je n’ai jamais pris de drogue, je n’ai jamais été saoule, mais quand je suis prise dans un livre, cela me procure un effet étrange. Je plane, je suis vraiment ailleurs, déconnectée de ma vie réelle, tout en y gardant quand même un pied sur la Terre ferme. Et j’ai ressenti, je le ressens encore maintenant, cet état où je plane à moitié, à chaque fois que je me plonge dans une lecture.

Mais attention, cet état bien que plaisant est dangereux également. En effet, vivant à moitié dans une fiction consciente, quand je lis quelque chose de réel, de triste, ça me percute à une vitesse incroyable. Cela me touche en plein fouet. Mon hypersensibilité n’a plus de filtre, plus d’armure. Une gifle. Une claque. Un choc.

Les mots ont plusieurs vies. Il y a les mots que l’on lit. Les mots que l’on écrit. Les mots que l’on entend. Les mots que l’on dit. Les mots que l’on pense. On peut jouer avec eux, les faire chanter, les faire rimer, rythmer, danser. On peut les découper, les coller, les inventer. On peut aussi les oublier, les cracher, les chuchoter, les taire. On peut s’en souvenir, on peut en inventer, en créer. Oui, on peut faire tout cela avec les mots.

D’ailleurs, combien de fois n’ai-je pas lu « mort » pour « mot ». Ou panser les maux par les mots.

Les mots peuvent en effet tuer. Les mots peuvent aussi guérir, soigner, sauver.

Dans mon boulot, mes mots sont mes amis. Tantôt, ils représentent un nom (de personne, de médicament, de maladie), tantôt, ils sont les messagers d’une douleur, d’une souffrance, d’une question. Dans mon boulot, oui, les mots peuvent soigner les maux, mais ils peuvent aussi faire beaucoup de mal. Lire, entendre que l’on a découvert une maladie, faire part d’un décès (naturel ou non), s’inquiéter pour la vie d’une personne que l’on aime, c’est difficile.

Alors, moi, pour ne pas rester avec ces MoMo (Mots-Maux), j’écris. Même si personne ne me lis (l’avantage des milliers (millions ?) de blogs existants, on peut passer inaperçu sans problème), le simple fait d’écrire, de voir ces mots, mes mots, mémos, sortir de ma tête, de les lire sur mon écran blanc d’ordinateur, m’aide à m’exprimer. Il ne faut pas garder ces choses qui font mal en dedans de nous. Et quand je n’ai pas envie d’écrire, je lis. Je lis pour penser à autre chose. Je lis pour oublier. Je lis pour m’évader. Je lis pour m’échapper. Je lis pour vivre d’autres vies. C’est là que je me rends compte que je lis beaucoup en ce moment pour fuir une réalité. Réalité d’une guerre, réalité de violences quotidiennes, réalité d’un monde que je n’aime plus, réalité d’un futur inquiet pour mes enfants, réalité d’une économie qui va tuer des gens, réalité d’un espoir éteint.