Une fois par mois, je propose à mes amies d’écrire un texte à partir d’un « démarreur », une « contrainte ».
Janvier :
- Mélange toutes les lettres de ton prénom + nom
- Écris une liste de minimum 10 mots avec ces lettres
- Écris un texte avec 3 mots de ta liste
Christine : Rêve, féliciter, vie
M’envoler dans mes rêves, rêver que je m’envole, que je quitte ce monde de fous pour un monde comme je le rêve.
On peut toujours rêver !
Mais, parfois, la réalité me sauve de mes rêves, quand je suis soulagée de me rêve-eiller.
Crier : Ouf ! Ce n’est qu’un rêve et me féliciter d’être en Vie.
Fabienne : Aube, lieu, beau
Connaissez-vous la villa l’Aube à Cointe ? c’est l’œuvre de l’architecte Serrurier-Bovy qui avait fait construire ce lieu pour lui et sa famille au début du 20ème siècle. Rien de plus beau à mes yeux ! Rien de plus mystérieux aussi, car ce lieu emblématique d’une époque n’est pas ouvert au public. On peut juste s’arrêter devant,s’extasier, regarder, rêver, imaginer…

A chaque journée du Patrimoine, je me dis que peut-être ses propriétaires vont ouvrir leurs portes au public mais ça n’est jamais arrivé jusqu’ici du moins pas à ma connaissance. Au musée de la Boverie à Liège, on retrouve certains meubles conçus par Serrurier-Bovy, une expo lui a été consacrée il y a quelques années. Peut-être que certaines des pièces qui étaient exposées ont meublé sa maison…peut-être.
Je pense qu’il est possible d’avoir une idée de ce qu’était l’intérieur de cette maison à travers des photos d’époque mais je préfère laisser courir mon imagination… Pourquoi ce nom l’Aube ? Que représente la jeune fille de la photo ? Je “zoome “ sur la photo pour en examiner les détails.

Une jeune fille qui s’éveille dans un chatoiement de couleurs ? Elle s’étire, lentement, elle est encore tout endormie. Que lui réservera la journée ? le début d’une nouvelle aventure, un renouveau ? le printemps ? la lumière ?
Pourquoi l’artiste a-t-il représenté cette jeune femme ? L’aménagement dans la villa “L’Aube” apportait-elle un changement dans la vie de Serrurier-Bovy ? un nouveau départ ?
Curieuse, je consulte quand même Wikipedia (!) et je lis : “Cette mosaïque est l’œuvre d’Auguste Donnay, On perçoit un contraste entre la sérénité du personnage et les éléments qui, autour, se déchainent.
On y observe une jeune dame (une allégorie ?) à la chevelure rousse sortant de son sommeil en s’étirant les bras. La nuit sous la forme d’un ciel étoilé semble faire place au jour naissant et aux reflets du soleil sur une mer agitée. C’est l’aube!”
Bizarre ! Je n’avais pas perçu des éléments déchaînés autour de la jeune dame. A chacun son interprétation ! Voilà qui me donne envie de retourner admirer une fois de plus la villa “L’Aube”, de l’extérieur comme d’habitude !
Cécile : Cerise, mer, air
Il n’y a pas si longtemps, j’ai fait une découverte extraordinaire. Un nouveau fruit. Pas si nouveau en réalité. Plutôt une nouvelle variété. La cerise salée. C’est en me promenant dans les dunes de la mer du Nord que je l’ai trouvée. J’ai dû un peu fouiller. Creuser. Retourner un bon paquet de sable.
C’était en septembre. Fin du mois, l’été était encore là, bien présent. Comme un été indien dit-on. Je voulais prendre l’air, faire une promenade, une belle balade dans la nature, au grand air, à la mer.
Il faisait chaud, mais une légère brise marine caressait mon visage avec bienveillance et fraicheur. Le bonheur. Il était tôt. J’aime sortir quand il n’y a pas grand monde, peu de gens à croiser, beaucoup d’oiseau à observer. D’ailleurs, les oiseaux, mouettes et goélands, je les ai d’abord entendus avant de les voir. Je les admire. Ce sont les rois des animaux, ils sont à l’aise tant dans les airs, que sur mer et même, pour certains, sur terre. La veille, j’avais été témoin d’un chapardage. Une mouette rieuse, l’espèce la plus commune ici par chez nous, n’a pas hésité à se poser près d’une mère de famille et de ses deux jeunes enfants. Pendant qu’elle mettait de la crème solaire sur le dos de l’un des garçons, l’autre tenait une tartine entre ses petites mains. Il a vu l’oiseau et naïvement, il a tendu sa main pleine de nourriture vers lui. La mouette n’a pas hésité une seule seconde, elle s’est approchée en marchant de son pas vif et sûr, a tendu le cou, ouvert son bec et hop, le morceau de pain était à elle. Fière et heureuse de son gain, elle s’est vite envolée pour être harcelée par d’autres congénères qui n’avaient pas loupé une miette de la scène.
A l’évocation de ce souvenir tout frais, je souris. Le lendemain, je suis dehors, toute seule. Il est sept heures et dans les dunes, je ne croise que deux ou trois promeneurs avec leur chien. Je marche durant quelques instants, à profiter des cris des oiseaux, de l’embrume marine, du moment. J’avoue que je regarde plus volontiers en l’air qu’à mes pieds. Les oiseaux sont tout là-haut ou parfois posés dans les arbres, ou encore au sommet d’une dune, et même, bien sûr au sol, mais plus loin sur la ligne d’horizon. C’est au moment où j’avais le nez levé que j’ai trébuché. Le sable a amorti ma chute. Je ne me suis pas fait mal. Et c’est là, à quatre pattes au sol, des grains de sable partout sur mes genoux et mes mains que j’ai identifié le coupable de ma chute. La coupable devrais-je dire : une racine, ou plutôt une branche enfouie. Étonnée de voir cette branche au milieu des dunes, sans arbre, sans buisson à proximité, j’ai voulu la ramasser. Elle était coincée, ou plutôt elle tenait bien fermement à son tronc. Ma curiosité piquée à vif, j’ai commencé à la frotter, à la dégager du sable, à voir jusqu’où elle allait. Et c’est tout un arbre que j’ai désensablé ! Il m’a quand même fallu deux heures pour arriver à voir qu’il s’agit d’un arbre entier qui était sous le sable.
En deux heures, j’en ai croisé du monde. D’autres curieux. Des passants, des promeneurs, des habitués. Pas un ne m’a aidé. Pas un n’a pu identifier l’objet de mes fouilles, car tous, oui tous et toutes me prenaient pour une illuminée ! Ils ne voyaient pas ce que je voyais ! Aussi incroyable que cela puisse paraître, j’étais bel et bien la seule à pouvoir voir, toucher et sentir ce végétal particulier. J’ai dû me pincer la joue pour être sûre que je ne rêvais pas. Pincée à m’en faire mal.
Les gens ont fini par se désintéresser de ma petite personne. Heureusement, je n’ai pas eu la surprise de voir débarquer la police ou, pire, un médecin psychiatre. Ils ont dû croire que j’étais une simplette, une personne avec quelques cases en moins. Jugée pas méchante ni agressive, je ne faisais de mal à personne, ils m’ont laissé continuer toute seule mes fouilles.
J’ai d’abord trouvé les fleurs. Couleur miel, ressemblant comme deux pétales aux fleurs du merisier (Prunus avium) bien connu de chez nous ! Sachant que les fleurs de cet arbre fruitier éclosent en avril ou mai, je me sentais de plus en plus perdue, déboussolée par ce que je voyais ! Plus je creusais, moins de fleurs je comptais. Plus bas, encore plus bas, se trouvaient des fruits ! Des cerises, rondes et lisses comme les nôtres, mais d’une autre couleur. Couleur de sable, avec de minuscules petits points foncés. Avant d’en cueillir une, je tâtais celle qui se trouvait la plus proche de moi, à porté de main. Étrange ! Texture lisse malgré les petits grains foncés. Comme des taches de son : des cerises rousses de sable ? Des cerises de sable ? J’en cueille une. Entre le pouce et l’index, je la palpe et évalue sa consistance. Chair ferme. Juteuse ? Sucrée ? Avant de mordre à pleine dent, je la lèche, la goûte du bout de la langue. Ouah ! Malgré la peau lisse sous mes doigts, elle est râpeuse sur ma langue. Comme la langue d’un chat. Elle accroche mes papilles et pétille sur mes gencives. De mes incisives, je la coupe en deux, en faisant attention au noyau central. Je suis étonnée, il n’y a rien de dur à l’intérieur, pas de noyau, pas de pépin, mais une bille de grains. Des grains non pas de sable, mais de sel ! Une cerise à la saveur extérieure sucrée et aux entrailles salées. Détonnant ! Je ne sais pas si j’aime, c’est bizarre. Préférant les plats salés aux sucrés, ça me perturbe quand même ce mélange sucré-salé. Pas mauvais, mais pas spécialement bon non plus. Mitigé. Moyen. J’hésite.
Après cette surprise de taille, je m’assieds en tailleur et sors mon carnet de croquis. Pour immortaliser cet arbre fruitier ensablé aux couleurs de dune et au goût de mer sucriodée.
