Deux petits chats-d’orage

23h48.
Deux petits chats dehors.
Par temps d’orage, je compte les crocodiles comme d’autres comptent les moutons.
Le rose, le bleu et le blanc se disputent le ciel tandis que les coups de tonnerre grondent au dessus de ma tête.
Ça grogne, ça éclate. Dehors, les éclairs illuminent tant le jardin que les intérieurs.
Deux.
Deux petits chats dehors.
Deux autres à l’intérieur.
Une heure passe et repasse. Couchée, je ne dors pas. Et je compte les crocodiles comme d’autres comptent les moutons.
25, un paquet de crocodiles… je pense à me rendormir.
20, 15, 10. Ils reviennent. Les crocodiles se rapprochent. Menaçants. Gueules ouvertes. Gorges déployées. Dents acérées.
Deux petits chats dehors.
7, 5, 3. Je ne me rendors pas. Impossible.
Minuit dix. Ils sont là tout proches. Flash et crack ! Il est là pile au dessus de nous. Le crocodile est un monstre. Un monstre bruyant. Il est en colère. Il pleure. Il crie. Il hurle. Sa queue fouette les arbres. Immensité, il trône et maîtrise les éléments en fureur. À grands coups de zebrures, il nettoie les extérieurs, il déchire le silence.
Flashs et éclats lumineux à répétition. Les crocodiles sont regroupés et dansent parmi les étoiles apeurées. Ils chantent à tue-tête, couvrent mes appels.
Deux petits chats dehors.

Un chat à l’intérieur. Tout contre moi, sursaute. Il se décolle de mes jambes alors que ça claque au-dehors.
L’autre est couché en bas, face à la porte vitrée. Besoin d’être rassurée. Câlins et ronrons dedans, valse de lumières dehors.
Le bruit assourdissant vibre dans mes tympans.
La pluie, le vent frappent les fenêtres, secouent les parasols, inondent mes pensées, fouettent mes craintes.
2 petits chats dehors.
Je ne compte plus les crocodiles mais égraine le temps violent.

Il pleut, il cogne sur les vitres comme autant de sanglots libérés, expulsés, déchirés.
00h41 les mots frottent ma tête dans un froufrou désordonné. Ils chuchotent et se bousculent gentiment. Ils demandent à sortir. À vivre. À exister de leur côté.

Deux petits chats dehors poursuivis par des crocodiles juvéniles.
Les petits chats ne sont pas là. Ils ne se montrent pas. Je ne leur en veux pas. C’est leur choix.
Bientôt une heure du matin. Vont-ils bien ?
Les petits chats ne sont toujours pas ici.
Les crocodiles sont partis aussi.
Ne laissent derrière eux qu’une trace imaginaire. Un rêve. Des images. Des mots.
Et la pluie. Leurs sanglots longs et bruyants.

L’orage est terminé. La pluie continue à tomber. Il est temps de se recoucher. Et de ne plus compter. De ne plus penser. De ne plus rêver. Il faut à présent me poser. Me reposer. Ne plus rien imaginer. Me fermer aux doutes et aux espoirs pour laisser le sommeil me gagner.

Je compte les moutons quand les crocodiles reviennent ! Pas le temps de les voir arriver ni de les compter. Subitement. Soudainement.
00h58 ça recommence ! Les crocodiles sont roses et reviennent pour la dernière danse effrénée… endiablée.
1h00.
Deux petits chats dehors et un crocodile à la traîne.

Photo personnelle de l’année dernière

En savoir plus sur Écrimagine

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.

Avatar de Inconnu

Auteur : ecrimagine

La lecture, l'écriture, la photographie et l'observation de la nature, sont pour moi de bonnes sources d'apaisement, de relaxation, d'imagination, d'évasion, de partage, de découverte,...

Une réflexion sur « Deux petits chats-d’orage »

  1. Coucou ah oui moi je n’ai pas compter ni les crocodiles, ni les moutons, je suis restée éveillée en attendant monsieur Giordano qui est rentré plus tôt que des deux vagabonds! vers 0h48!!trempé comme une soupe!! ah ces chats!! bisous

    J’aime

Laisser un commentaire